Où il est question de…hum, où il est question de tellement de choses passionnantes qu’il serait difficile d’en faire la liste ici. Oui, Fred.Le Falher est bavard (même par mail) pour le plus grand plaisir de l’intervieweur en chef (qui l'excuse du coup de n'écouter ni reggae, ni métal), du coup, taisons nous et lisons le !
Bonjour, évidemment, comme toute interview du CrewK une première question obligatoire, on écoute quoi quand on arrive chez toi ?
On écoute du rock et de la pop, en français comme en anglais. Un peu de "chanson" aussi. Je peux mentionner aussi ce qu'on n'écoute pas : pas de jazz, pas d'électro, pas de hip-hop, pas de reggae, pas de métal. On écoute des CD et des vinyles, parfois même des cassettes.
En ce moment : Arcade Fire (comme tout le monde), le dernier Katerine, The Kissaway Trail, Okkervil River, John Grant, Richard Hawley…
Tu peux nous en dire un peu plus sur toi, qui es tu, d’où viens tu, que fais tu ?
J'ai 42 ans, je vis avec ma copine Cathou depuis une dizaine d'années, et on est les z'heureux parents de deux minettes adorables et épuisantes, Lili et Nina. On vit à Aurillac, dans le Cantal (pas très glamour…) où je suis prof d'arts appliqués auprès de lycéens en formation de graphiste. Avec eux, je mets en place presque exclusivement des projets orientés vers l'univers du rock, un choix complètement arbitraire et assez jouissif, qui me permet de joindre l'utile à l'agréable. On fait des bouquins illustrés, des affiches sérigraphiées, des journaux, des vidéo-clips… On rencontre les groupes et artistes sur lesquels on travaille pour leur présenter le travail effectué, certains viennent nous voir au lycée, sinon on traverse l'Auvergne en car pour amener les élèves aux concerts, on rentre en pleine nuit… C'est une conception du métier de prof qui n'est pas de tout repos, mais c'est assez exhaltant. L'an dernier, on a fait quelques clips pour la scène auvergnate (Cracbooms, Araban, Garciaphone), on a surtout monté un gros projet autour de (et avec) Dominique A, avant d'enchaîner avec les French Cowboys, et de finir l'année en beauté avec Charlotte Gainsbourg…
A côté de ça, mon autre grosse activité tourne autour du fanzine rock qu'on a créé avec des copains, et qui s'appelle le Mange-Disque. Le rythme de sortie est très aléatoire et la ligne éditoriale tout sauf érudite. J'écris quelques articles et je m'occupe surtout de l'aspect visuel : maquette, typos, illustrations… et cadeaux (à la façon de Pif-Gadget, chaque numéro est accompagné d'un petit objet-promo estampillé Mange-Disque, ça va du badge au sous-bock en passant par le magnet, le sticker ou le ballon de baudruche…). Le Mange-Disque nous amène aussi à jouer les DJs occasionnels en écumant les bars aurillacois, vinyles sous le bras…
Et puis quand la vie de famille, le boulot et le Mange-Disque m'en laissent le temps, je dessine aussi pour honorer quelques commandes extérieures : affiches de concert, logos, pochettes de disque… etc.
Quand as-tu commencé à crayonner ? As-tu suivi un cursus particulier par la suite ou t es tu formé seul à force de dessiner dans les marges ?
Comme la plupart d'entre nous, je dessine depuis tout petit. Après le Bac et deux années foireuses en fac, j'ai démarré les Beaux-Arts à Clermont-Fd avant de bifurquer vers l'école de St-Etienne, qui proposait l'option Communication et audio-visuel (les arts plastiques purs et durs, très peu pour moi), où j'ai passé le DNSEP en 1992.
Aujourd’hui tu en vis ou tu as une autre activité à coté ?
Mon métier, celui avec lequel je gagne ma vie, c'est prof. Tout le reste, c'est du bonus. Ceci dit, je ne fais pas de séparation très nette entre mes différentes activités, toutes réunies par une identité "rock". Par exemple, un projet mené au lycée avec Dominique A permet de faire une interview pour le Mange-Disque et un portrait dessiné du chanteur pour l'illustrer. De la même façon, la Coopérative de Mai (super salle de concert à Clermont-Fd) est un partenaire fidèle et précieux pour nos projets lycéens, mais aussi un "employeur" occasionnel pour mon activité d'illustrateur. Finalement, tout ça se complète et marche ensemble de façon assez naturelle.
Collabores tu à des journaux/ fanzines ou publications régulières ?
Le Mange-Disque, voir ci-dessus. (héhé les joies de l'interview par mail :)
Quelle est ta journée travail type, si il y en a une...
Pas vraiment de journée-type… Mon rythme est calé sur le calendrier scolaire, avec des périodes un peu plus cools quand les élèves sont en stage (avantage non négligeable d'être enseignant en lycée professionnel), où j'en profite pour consacrer un peu plus de temps au dessin. En général, c'est quand même plutôt le soir que je dessine, quand les filles sont (enfin) au dodo…
D’où provient ton inspiration ? Y a-t-il des artistes/graphistes qui ont compté pour toi (en langage rock, quelles sont tes influences) ?
L'inspiration, c'est la musique qui accompagne mes journées, la presse rock (ou pas rock) que je lis régulièrement, ce que je vois à la télé, dans les bouquins, dans la rue… Dans ce maelstrom perpétuel, forcément, il y a des icônes qui ont fini par s'imposer. Je peux citer des types comme Saul Bass, un graphiste américain qui a créé des génériques et des affiches magnifiques pour les films d'Hitchcock et Otto Preminger. Je suis aussi un gros fan de Serge Clerc, dessinateur rock par excellence dont les petits bonhommes éparpillés dans les pages de Rock&Folk m'ont fasciné quand j'étais lycéen (je passais mon temps à les recopier). J'adore aussi des mecs comme Art Chantry et Jeff Kleinsmith (graphistes américains, deux stars absolues du gig-poster) : tout ce qu'ils font est super beau. Je peux aussi citer Reid Miles, graphiste historique du label Blue Note : je déteste viscéralement le jazz (rien à faire, c'est quasimment physique), mais les pochettes de Reid Miles pour Blue Note sont parmi les plus belles pochettes de tous les temps. Et puis en ce moment, je suis assez admiratif de Blexbolex, qui enchaîne des bouquins tous plus beaux et étonnants les uns que les autres. D'une façon générale, je suis attiré par les esthétiques très stylisées et économes en moyens.
Quelles sont les principales étapes dans ton travail (du croquis au final) ? Tu fais tout à la main ou à l'informatique ?
Il est très rare que je passe par le croquis. Je dessine presque exclusivement à l'ordinateur depuis une dizaine d'années. Par esprit de contradiction peut-être, ou par facilité, je travaille sur Quark X-Press, qui n'est pas du tout un logiciel de dessin mais de mise en page. N'étant pas du tout à l'aise avec l'outil informatique, j'ai utilisé X-Press un peu par défaut. Quand je me suis aperçu qu'on pouvait tracer des polygones et les mettre en couleur très rapidement sur X-Press, j'ai entrepris de dessiner là-dessus et depuis, je ne m'en suis jamais lassé, au point que je suis devenu complètement réfractaire à Illustrator, par exemple. Les contraintes imposées par le logiciel m'imposent de dessiner de façon très stylisée, presque géométrique (pas facile de faire des courbes, par exemple), mais j'aime assez travailler dans la contrainte, donc ça ne me gêne pas. Avec le temps et l'habitude, je parviens à me passer complètement de l'étape du croquis sur papier, en cherchant directement mes idées souris à la main. Par contre, je garde en mémoire beaucoup de versions intermédiaires sur lesquelles je reviens régulièrement, et qui fonctionnent du coup comme des sortes de "croquis numériques", évolutifs.
Au final, combien de temps nécessite la réalisation d'une affiche ?
Très difficile à dire. Je pinaille beaucoup, j'avance assez laborieusement… Ça prend quand même pas mal d'heures à l'arrivée. Le plus dûr, évidemment, c'est de trouver la bonne idée. Une fois que c'est parti, ça avance tout seul. Lentement, mais tout seul.
Tu as un style très caractéristique, tu ne fais que ce dont tu as envie, ou bien si demain on te demande une huile de chevaux qui courent dans la mer sur fond de soleil couchant, il n'y a pas de problème t'es sur le coup ?
On ne me demande pas ce genre de trucs, heureusement, je serais bien incapable de faire ça. L'avantage que j'ai, c'est que le dessin n'est pas mon métier. Je gagne ma vie en tant que prof, du coup je n'ai pas besoin de "courir le cacheton". C'est un luxe qui me permet de n'intervenir que sur des projets qui me plaisent, c'est-à-dire généralement orientés vers le rock. Bon, je dois reconnaître que j'ai parfois accepté des propositions autres, et pas toujours très glorieuses, souvent parce qu'elles venaient de copains… Mais en général, les gens qui me sollicitent savent à quoi s'attendre et m'accordent une assez grande liberté.
Comment t es tu retrouvé à réaliser une affiche pour Rock en Seine ? Qui a contacté qui ?
Je connais François Missonnier, le boss de Rock-en-Seine, parcequ'il s'occupe aussi du festival Europavox à Clermont-Fd, sur lequel on intervient régulièrement avec mes élèves. François connait le Mange-Disque et certains dessins réalisés pour la Coopé, où on se croise plus ou moins régulièrement, souvent au bar. Je connais aussi Gwenaëlle Kerboul, qui bosse sur Europavox depuis des années. Bref. Je connaissais le principe de l'expo Rock Art, au point d'avoir emprunté l'idée avec mes élèves sur Europavox (avec l'autorisation de François, bien sûr). Quand j'ai su qu'il relançait le projet Rock Art pour Rock-en-Seine 2010, je lui ai demandé si il était possible d'y participer à titre personnel cette fois, et c'était parti… Encore un exemple de collision fructueuse entre les intérêts du prof et ceux du dessinateur, en somme…
C’est toi qui a choisi le groupe que tu allais illustrer ou était ce un sujet imposé ?
Je ne l'ai pas complètement choisi. Dans mon premier choix, il y avait cinq groupes, mais pas celui-là . Gwenaëlle m'a proposé un deuxième choix en faisant une sélection parmi une douzaine de groupes restant, j'en ai retenu cinq, et c'est Plan B qui m'a été attribué. Contrainte, donc, mais encore une fois, je trouve le principe plutôt intéressant, je l'ai pris comme faisant partie du jeu. Et puis franchement, j'aurais pu plus mal tomber. Plan B, je connaissais deux titres, et je trouvais ça vraiment pas mal. Et puis leur prestation à Rock-en-Seine a été super classe, j'étais encore plus content.
Qu'est ce qui t’a motivé et qu'est-ce qui a été le plus difficile dans la réalisation de l’ affiche ?
Ce qui me motivait, c'était l'enjeu de participer à une telle expo, un peu prestigieuse quand même pour un petit gars anonyme du Cantal, en sachant que mon dessin allait se retrouver accroché aux côtés de ceux de Blexbolex, Thierry Guitard, Julien Pacaud, Rébéna… J'avais reçu un exemplaire du portfolio de l'édition précédente, et la perspective de rejoindre la sélection 2010 était assez excitante, je dois dire. Les délais étaient courts, ça obligeait à travailler vite et bien, avec l'angoisse de ne pas être à la hauteur du truc et donc, de décevoir les commanditaires. Grosse pression sur mes petites épaules, mais c'est ça qui est bon.
Tu recommencerais ?
Tu parles, avec plaisir !
Y a-t-il des artistes que tu réverais d’illustrer et, pour qui refuserais tu de travailler ?
Des artistes pour qui je rêverais de travailler : ça va de mes groupes préférés du coin (The Glums, La Position du Tireur Couché…) à Richard Hawley, la classe absolue du moment, en passant par Daniel Darc (un de mes vieux héros) et plein d'autres… Pour qui je refuserais : pas grand-monde, à part des types comme Florent Pagny, ça va sans dire.
Considères tu que tu fasses partie d’une certaine « scène graphique », si oui qui d’autre, à tes yeux, la compose ?
Houla non, je ne fais pas partie de grand-chose, si ce n'est du comité de rédaction du Mange-Disque !
Un peu d’autopromo, profites en c’est gratuit, où peut on admirer ton travail, sur le net et dans la vraie vie ?
On peut toujours aller voir le myspace du Mange-Disque : www.myspace.com/lemangedisque On peut surtout acheter le prochain numéro, qui devrait sortir en novembre (mais difficile à trouver quand on n'est pas auvergnat).Je participe en ce moment à une petite expo collective à Aurillac, où je présente une dizaine d'affiches parodique de films d'horreur campagnards (no comment…)J'ai également illustré le programme novembre-décembre de la Coopérative de Mai, qui devrait sortir dans les semaines qui viennent.Et je fais aussi la pochette du 45 tours des Balladurians, duo garage de Pau où joue mon frangin.
Y a-t-il un bouquin qui permette de mieux faire connaissance avec toi (rappel on est dans la rubrique autopromo :) ?
Ben… à part le Mange-Disque…
Le plus beau compliment que tu aies reçu dernièrement ?
Les copains ont bien aimé la prochaine couverture du Mange-Disque : chouette !
Qu’est ce que l’on peut te souhaiter pour la suite ?
Le Mange-Disque tiré à 50 000 exemplaires plutôt qu'à 150… Et encore, je ne suis pas certain qu'on soit plus heureux pour autant. Non, en fait tout va bien comme ça. Pourvu que ça dure.
Merci d’avoir répondu à mes questions et à très bientôt sur le site !
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