Thibault Balahy - Yann Tiersen

Thibault Balahy - Yann Tiersen

Où il est question de Requins Marteaux et d’enseignement, de Bon Scott Day et de Yann Tiersen , de journal de bord dépliant et communication visuelle option espace, en un mot comme en 100, de passion et de talent.


Bonjour, évidemment, comme toute interview du CrewK une première questionobligatoire, on écoute quoi quand on arrive chez toi ?

A la maison on écoute plutôt du Rock : les Pixies, Sonic Youth, White Stripes, Nick Cave, Neil Young, Death in Vegas, Radiohead, The Cure (premiers albums), Tom Waits… Et pour les artistes français : Noir Désir, Bashung, Programme, Air, Zone libre, Les Rita Mitsouko…

Tu peux nous en dire un peu plus sur toi, qui es tu, d’où viens tu, que fais tu ?

Je m’appelle Thibault Balahy, je suis né à St Etienne, mais j’ai aussi vécu en Bretagne et à Paris et surtout à Albi (ville de Toulouse Lautrec et des Requins Marteaux). Puis j’ai fait mes études supérieures à Toulouse (Une mise à niveau en arts appliqués, un BTS communication visuelle option espace, Une année de prépa Cachan puis la fac d’arts appliqués en licence et maîtrise). J’enseigne aujourd’hui à Angoulême cette discipline à des lycéens et étudiants (de mise à niveau entre autre, la boucle est bouclée). Parallèlement, je suis auteur de bande dessinée, dessinateur et illustrateur (affiches, pochettes de cd, édition ou presse). J’ai choisi l’enseignement pour ne pas dépendre de contraintes «alimentaires » et exercer ma passion en toute liberté. J’essaie autant que possible d’aborder le dessin non pas comme une chose utilitaire mais comme un
art à part entière.

J’entretiens une relation particulière entre dessin et musique, comme je ne suis pas moi-même musicien, le dessin m’a permis de me rapprocher de cet univers.

Depuis quelques années je remplis des carnets de croquis et aussi réalise des reportages graphiques pendant les festivals (que ce soit par commande comme pour le Cognac Blues Passions, Les expressifs de Poitiers ou pour mon plaisir personnel comme avec « Feue » la Garden Nef Party). Et je réalise des pochettes et affiches pour des groupes (Jettators, Old Blind Mole Orkestra, Coup d’Marron…). J’aime être dans cette problématique de recherche d’équivalences graphiques à un univers sonore. A chaque fois c’est un nouveau défi et une nouvelle opportunité d’aller dans un sens où je puisse moi-même me surprendre et trouver une iconographie « sur mesure » pour chaque nouveau projet.

Quand as-tu commencé à crayonner ? As-tu suivi un cursus particulier par la suite ou t es tu formé à force seul à force de dessiner dans les marges ?

J’aime à penser que je n’ai jamais arrêté de dessiner. Tous les enfants dessinent, il y a ceux qui s’arrêtent et ceux qui continuent. Moi j’ai continué.

A 10-11 ans je me suis dit que je ferais de la bd. Adolescent, je suivais des cours de dessin à la MJC d’Albi, c’est là que j’ai vu les débuts des futurs Requins Marteaux (autour d’un fanzine qui s’appelait « Jetez l’encre »). J’ai ensuite fait un bac arts plastiques puis des études d’arts appliqués. Ca fait beaucoup d’heures passées dans les marges et sur des « planches ». Les arts appliqués ont été une bonne école pour acquérir les techniques et la culture nécessaire pour former l’œil.

Je fais aussi partie d’un atelier à Angoulême (l’atelier du gratin) crée par Benoît Preteseille. On est une dizaine d’auteurs (dont notamment Laurent Bourlaud- créateur de l’affiche rock en seine 2010). Et le contexte de l’atelier est une façon de continuer à échanger, être à l’écoute des remarques et conseils
des uns et des autres.

Aujourd’hui tu en vis ou tu as une autre activité à coté ?

Comme je le disais, je partage mon temps entre enseignement et pratique du dessin. Mais les deux sont assez liés : quand je ne dessine pas, ce sont mes étudiants qui le font ! Je suis toujours dans un environnement créatif. C’est quand même plus sympa que de dessiner après avoir fait ses heures d’usine ou de bureau. Donc la nécessité d’en vivre n’est pas une obsession. De toute façon le dessin a toujours été là. Payé ou pas.

Collabores tu à des journaux/ fanzines ou publications régulières ?

Pas de façon suivie. Je participe au collectif Café Creed (auteurs issus de l’école de l’image d’Angoulème), j’ai fait un petit récit dans le Choco Creed #7 sur le thème de la nourriture. Sinon je fais mes propres histoires pour l’édition ou en auto-édition. J’ai aussi participé au Bon Scott Day de Lolmède et au Cheval de Quatre #8 (collectif bd sur le thème du carton).

Quelle est ta journée travail type, si il y en a une...

Chaque jour est différent. Je m’adapte par la force des choses en fonction du temps que me laisse mon travail d’enseignant, c’est pour cela que je privilégie un travail rapide et un goût pour la spontanéité (comme pour le croquis). Je ne cultive pas une imagerie sophistiquée, je préfère la simplicité ou la brutalité.

Donc pas de journée type : je peux ne rien faire ou dessiner 10 heures suivant les besoins. Je suis un glandeur qui peut travailler de façon forcenée. Il faut savoir aussi ne rien faire.

D’où provient ton inspiration ? Y a-t-il des artistes/graphistes qui ont compté pour toi (en langage rock, quelles sont tes influences) ?

Clairement, la découverte des sérigraphies Bongoût exposées pendant les Eurockéennes 2004 (puis au festival Off à Angoulême) a été un élément déclencheur en ce qui concerne cette envie de produire une imagerie rock et arty. Le terme « Arty » peut faire prétentieux mais je pense que la musique mérite un meilleur traitement qu’un baril de lessive, les artistes doivent dialoguer entre eux ça donne de très belles choses (je pense aux affiches de Lautrec, Mucha, la pochette du Velvet par Warhol…). Graphiquement, il y a tellement de gens qui m’ont stimulé ou me stimulent encore que c’est dur de ne pointer que quelques noms. La seule pochette de Raymon Pettibon pour Sonic Youth m’a donné envie de faire des images pour la musique. L’affiche de Mon Oncle de Tati, les images de Saul Bass, le travail de Stanley Donwood pour Radiohead…

Souvent des images assez simples, parfois même minimalistes. Pour l’inspiration, tout est fertile : la musique, le cinéma, la littérature, la poésie et tout simplement les expériences de la vie elle-même, les rencontres.

Quelles sont les principales étapes dans ton travail (du croquis au final) ?

Je pars souvent de carnets où je pose diverses pistes puis je scanne et met en couleur sur l’ordinateur. Mais je n’ai pas de tablette graphique, j’aime trop le contact des outils traditionnels et du papier et je ne fantasme pas sur la technologie.

Au final, combien de temps nécessite la réalisation d'une affiche ?

Cela dépend des projets, je passe le plus souvent par une phase de tatônnement où j’envisage plusieurs scénarios. Puis c’est le va et vient avec le groupe ou le commanditaire qui oriente mes choix. La première phase peut prendre une semaine ou plus, par contre quand les choses sont fixées, une affiche peut être réalisée dans la journée ou quelques jours.

Qui s'occupe de réaliser les sérigraphies ?

J’ai fait quelques sérigraphies (j’aimerais utiliser plus souvent cette technique si particulière, à chaque fois je découvre de nouvelles potentialités). J’ai collaboré avec Cécile de la fanzinothèque de Poitiers pour deux travaux : la première pochette du groupe Old Blind Mole Orkestra et pour une résidence pendant le festival Les Expressifs (arts de la rue). J’en garde un très bon souvenir parce que ce projet mêlait des ingrédients que j’affectionne : dessin en « live » pendant la journée (concerts, spectacles), montage des images à sérigraphier (sous la forme d’un journal de bord dépliant) et l’organisation d’un stand par la Fanzino pour que les festivaliers s’essaient à la sérigraphie et repartent avec un exemplaire souvenir. Sinon je viens juste de terminer Trois posters pour une expo de sérigraphie organisée par l’atelier du gratin et café creed pour le prochain festival de bande dessinée d’Angoulême.

Tu as un style très caractéristique, tu ne fais que ce dont tu as envie, ou bien si demain on te demande une huile de chevaux qui courent dans la mer sur fond de soleil couchant, il n'y a pas de problème t'es sur le coup ?

J’essaie de me ré-inventer à chaque projet, mon style n’est pas figé sur une technique ou une forme particulière. Je suis toujours en « formation », je cherche. Je ne peins plus à l’huile depuis 1930. Je refuse rarement une commande (jusqu’ici j’arrive toujours à m’approprier la contrainte) mais s’il le faut je le ferais (pour des raisons de forme ou de fond).

Comment t es tu retrouvé à réaliser une affiche pour Rock en Seine ? Qui a contacté qui ?

Alexandre Clérisse (qui fait partie du même atelier) a été sollicité, j’ai envoyé un lien vers mon myspace à François Missonier et il m’a dit ok. On s’est retrouvé comme ça à 5 membres du Gratin à participer à Rock Art. C’était très sympa.

C’est toi qui a choisi le groupe que tu allais illustrer ou était ce un sujet imposé ?

J’ai proposé mon top five, dans lequel était inclus Yann Tiersen. J’étais très content de faire son affiche car son univers un peu sombre et intérieur me parlait bien.

Qu'est ce qui t’a motivé et qu'est-ce qui a été le plus difficile dans la réalisation de l’ affiche ?

La motivation c’est l’obligation de ne pas se vautrer et respecter l’univers d’un musicien de talent. C’est une certaine pression mais ça tire vers le haut.

Le plus difficile a été de trouver l’image adéquate pour évoquer la musique de Tiersen sans trop tomber dans des poncifs ou des choses déjà exploitées (Amélie Poulain par exemple). Autre aspect : l’imagerie Tiersen tourne autour de la photo plus que du dessin. Il me fallait trouver le bon ton. J’ai choisi d’aller vers une certaine forme d’abstraction avec cette entaille de couleur et d’y associer une tête-paysage qui mêle celui qui contemple et ce qui est contemplé pour exprimer cette intériorité mélancolique propre à la musique de Tiersen.

Tu recommencerais ?

J’aurais beaucoup aimé reparticiper à Rock Art édition 2010 mais place aux autres. Je continue de toute façon à créer des affiches, je vois cela comme part entière de mon travail.

Y a-t-il des artistes que tu réverais d’illustrer et, pour qui refuserais tu de travailler ?

Clairement, j’adorerai faire une pochette pour Noir Désir, Turzi, Air, et tant d’autres. Je refuserai de travailler pour une musique qui ne me parle pas (toujours ce problème de fond et de forme et ce souci de cohérence).

Considères tu que tu fasses partie d’une certaine « scène graphique », si oui qui d’autre, à tes yeux, la compose ?

A l’image de l’atelier du gratin où nous sommes grosso-modo d’une même génération, chacun cultive son altérité à travers des projets assez différents mais on a le sentiment d’une même famille : celle des auteurs-dessinateurs. Je m’identifierais plutôt à la bande dessinée « indé » mais ça ne veut pas dire grand chose. Je pense pouvoir aussi m’exprimer dans un contexte plus classique.

Au fond, c’est un problème de critique ou de théoricien, pas celui de « faiseurs ».

Un peu d’autopromo, profites en c’est gratuit, où peut on admirer ton travail, sur le net et dans la vraie vie ?

http://ultra-book.com/-thibaultbalahy (Book en ligne sur mes divers projets)

http://www.myspace.com/mynameisjohnmcenroe (travaux autour de la musique)

http://thibault-balahy.over-blog.com// (mon blog pour suivre mon travail de façon plus régulière et détaillée)

je participe ausi au projet "les autres gens" projet collectif de bd en ligne drivé par Thomas Cadène au
scénario... http://www.lesautresgens.com/spip.php?rubrique52
Sinon, rendez-vous en janvier 2011 pendant le festival international de la bd à Angoulême avec une exposition de sérigraphies de l’atelier du gratin à la maison des Jumelages.

Y a-t-il un bouquin qui permette de mieux faire connaissance avec toi (rappel on est dans la rubrique autopromo :) ?

« Dawson » est une bande dessinée réalisée en collaboration avec le chanteur de Coup d’Marron, Wilfried Hildebrandt. Là encore un croisement entre dessin et musique. Cet album sorti en mars 2010 a connu un souci de diffusion mais il va ressortir bientôt (diffusion Makassar). En attendant, on le trouve sur amazon ou
sur le site de l’éditeur http://www.ziketbulles.fr//. C’est une histoire à visage humain sur le rêve du voyage et le rapport au père, ça se passe dans le nord du Canada.

La boîte chez Alain Beaulet éditeur. Je livre ma vision de l’art et de la création à travers un récit muet métaphorique.

Le plus beau compliment que tu aies reçu dernièrement ?

« Vous avez fait un beau petit gars ». Je suis papa depuis quelques mois.

Qu’est ce que l’on peut te souhaiter pour la suite ?

Pleins de projets, de commandes, être contacté par des labels de musique, bref

de nouveaux défis.

Merci d’avoir répondu à mes questions et à très bientôt sur le site

1 commentaire:

Anonyme a dit…

On vous kiff grave ms'ieur :D